Colloque et conférence du Dr Delépine : Essais thérapeutiques - transposition en droit français de la directive européenne 2001/20/CE

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Essais thérapeutiques : conséquences



Essais cliniques : les quatre phases



Phase I :
Première étape au cours de laquelle on teste le produit sur des êtres humains. Les essais sont menés sur des volontaires sains, indemnisés et sous strict contrôle médical.
Informations sur la tolérance du produit et sur sa pharmacocinétique (ce qu'il devient dans l'organisme).

Phase II
Petit groupe de malades.
Déterminer les doses et posologies adaptées et observer si la molécule apporte bien le bénéfice thérapeutique attendu sans entraîner trop d'effets secondaires.

Phase III
Confirmer le rapport efficacité-tolérance de la molécule sur d'importantes populations de malades.
En identifier les effets secondaires les plus fréquents.
On compare par ailleurs le principe actif à d'autres médicaments prescrits dans la même indication.
On détermine les précautions d'emploi chez les personnes à risque.

Phase IV
Après commercialisation
A pour principal objectif une meilleure utilisation chez tous les types de patients.
Impératifs de pharmacovigilance en identifiant notamment d'éventuels effets indésirables non détectés auparavant.

Soin et recherche


Le soin est une activité thérapeutique, qui s'adresse à la subjectivité d'une personne singulière tandis que la recherche tend à l'objectivité d'un individu biologique.
La première démarche incorpore en elle l'écoute personnalisée d'un sujet.
La seconde substitue le souci épistémologique de mettre à jour les lois impersonnelles du vivant.

Soin et recherche avis 79


"Une recherche est un processus de vérification d'une hypothèse destinée à consacrer ses conclusions en tant qu'éléments de connaissance généralisables"

Cette objectivation du malade dans la recherche expérimentale est un réquisit méthodologique.
Car c'est en éliminant tout ce qui est simplement subjectif et contingent (les impressions sensibles, les désirs, les émotions) que le savoir sur les maladies progresse. (??)

Textes de loi


La réalisation des essais thérapeutiques est encadrée par des textes de lois et des recommandations de bonne pratique clinique visant à protéger au mieux les patients qui y participent.
Un essai thérapeutique ne peut être mis en place s'il est contraire aux principes fondamentaux d'éthique.

Historique


C'est en 1947 avec le Code de Nuremberg qu'apparurent les premières recommandations d'ordre éthique mettant l'accent sur une disposition essentielle : le consentement éclairé du patient.

Plus tard, furent rédigées des recommandations concernant la protection des personnes participant à la recherche biomédicale.

L'Association Médicale Mondiale a adopté en 1964 la Déclaration d'Helsinki en vue de constituer un guide destiné à tout médecin procédant à une telle recherche. Cette Déclaration, dans son introduction, "constitue une déclaration de principes éthiques dont l'objectif est de fournir des recommandations aux médecins et autres participants à la recherche médicale sur des êtres humains.
Celle-ci comprend également les études réalisées sur des données à caractère personnel ou des échantillons biologiques non anonymes"
.

L'ensemble de ces recommandations est opposable au plan universel même si les règles de soumission d'un essai thérapeutique à un comité d'éthique ou de protection des patients varient d'un pays à l'autre.

Directive européenne 2001/20/CE et la dernière modification de la loi Huriet-Sérusclat adoptée le 9 août 2004


Le cadre juridique strict qui régit la recherche biomédicale prévoit que les recherches biomédicales ne peuvent être effectuées que si elles sont réalisées :
sous la direction et sous la surveillance d'un médecin justifiant d'une expérience appropriée, et dans des conditions matérielles et techniques adaptées à l'essai et compatibles avec les impératifs de rigueur scientifique et de sécurité des personnes qui se prêtent à ces recherches.

Avant le début de toute recherche biomédicale, le consentement écrit du patient doit être recueilli par le médecin investigateur afin de protéger les sujets qui s'y prêtent.

L'investigateur doit préalablement informer le patient, de manière claire, intelligible et loyale sur :

L'objectif, la méthode et la durée de la recherche, le rapport risque/bénéfice, ses droits : le sujet peut refuser de participer.

L'avis favorable délivré par le Comité de Protection des Personnes (CPP, anciennement dénommé CCPPRB) et l'autorisation de l'autorité compétente (AFSSAPS, Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé ou le Ministre de la Santé).

Enfin, le patient est en droit d'être informé sur les éventuelles alternatives médicales, les modalités de prise en charge en fin de recherche ainsi que des résultats globaux de la recherche.


Onde de choc


La transposition en droit français de la directive européenne concernant les essais thérapeutiques à usage humain a créée une onde de choc dans le microcosme de la recherche biomédicale française au moment de son arrivée. Qu'en est-il ?

Dispositions différentes de la loi Huriet Sérusclat du 20 décembre 1988


Celle-ci , malgré les sécurités pour le patient qu'elle était sensée apporter depuis 1988 avait rapidement été "accommodée" pour faciliter la recherche d'où l'inquiétude lors de la sortie de la directive.

Nouvelles dispositions


Abandon de la distinction de recherches "avec" et "sans" bénéfice individuel direct" pour introduire une nouvelle notion :
- celle d'estimation de la balance bénéfices / risque
cette modification permettrait de lever l'ambiguïté bénéficie d'un consensus international.

Bull. Acad. Natle Méd., 2003, 187, n°5,...-... séance du 27 mai 2003


L'Académie se félicite que disparaisse la distinction des recherches avec ou sans bénéfice individuel direct pour le malade, spécificité française absente des autres législations internationales traitant de la recherche clinique qui s'est révélée
ambiguë, d'interprétation variable, contestée dès la mise en application de la loi,
ayant toujours été une source de discussions, de contestations, de requalifications
par l'AFSSAPS ou la DGS.

Études avec ou sans bénéfice direct de la loi Huriet


Les contraintes imposées aux recherches "sans BID" (prévues à l'origine pour les essais thérapeutiques de phase I ou II sur volontaires sains) se sont révélées "inadaptées à de nombreuses situations, telles les recherches sur échantillon sanguin lors des soins courants" aboutissaient dans certains cas à arguer de l'existence d'un BID peut-être fictif.
D'autant que la création des lieux spécifiques à ce type de recherches était si compliquée que les cliniciens déclaraient que la recherche envisagée comportait bien un BID pour le patient/sujet de la recherche même si ce bénéfice était fort modeste, voire hypothétique.
L'absence de BID rendait aussi pratiquement impossible certaines études pourtant indispensables comme les études purement cognitives, physiopathologiques, ou en situation d'urgence.

Notion nouvelle en France de balance bénéfices - risques


Le rapport bénéfice risque qualifie la somme des avantages escomptés en contre partie des inconvénients pouvant survenir.

Le remplacement de la distinction entre recherche avec ou sans bénéfice individuel direct par la notion de balance "bénéfice - risque" entraîne ainsi un rétrécissement du champ de l'autorisation préalable du lieu de recherches.
Une modification des règles d'inscription au fichier national des personnes "se prêtant à des recherches"
Une unification du régime de responsabilité du promoteur, au profit du régime de la faute présumée.

Motifs de la suppression


"La suppression de la distinction entre les recherches avec ou sans bénéfice individuel direct et la transposition de la directive conduit à simplifier et harmoniser les conditions de participation à des recherches des différentes catégories de personnes vulnérables tout en maintenant des dispositions fortement protectrices, pour ces personnes,
empruntées non seulement à la directive, mais aussi à la convention d'Oviedo sur les droits de l'Homme et la biomédecine et au projet de protocole additionnels relatif aux recherches biomédicales".


Balance bénéfices risque


L'appréciation de la balance bénéfices/risques particulièrement difficile en matière d'innovation thérapeutique en cancérologie.

Nouvelles dispositions


Deuxième différence remarquable :
- augmentation des compétences des comités de protection des personnes dans la recherche.
- très positive, si l'indépendance projetée de ses membres est rendue effective. Ceci devrait être une avancée.

Le comité des personnes


Formule son avis en prenant en compte :
- le caractère satisfaisant de l'évaluation des bénéfices et des risques attendus [...] et le bien-fondé des conclusions.
- la qualité des installations.
- les montants et les modalités de rétribution ou d'indemnisation éventuelles des investigateurs et des participants à l'essai clinique et les éléments pertinents de tout contrat prévu entre le promoteur et le site.

Le comité d'éthique est "un organe indépendant [...] composé de professionnels de la santé et de membres non médecins".

Ces comités ne sont plus consultatifs mais décisionnels, ce qui pose les questions de l'engagement éventuel de leur responsabilité et de leur statut juridique.
La loi prévoit qu'en cas de faute d'un comité, la responsabilité de l'État est engagée attributions des comités considérablement étendues (loi de 2004).

Nouvelles dispositions


Cette directive ne rend obligatoire le fichier national des personnes se prêtant à des recherches que pour les produits de la compétence de l'AFSAPPS (agence du médicament).
Les volontaires sains ou les personnes malades pour lesquelles les bénéfices escomptés sont sans rapport avec l'état pathologique.

Personnes vulnérables


La directive prévoit de recourir à un représentant légal pour les personnes qui ne sont pas en mesure de donner leur consentement.

Le projet de loi distingue quatre catégories de personnes vulnérables :
- femmes enceintes, parturientes ou allaitant leur enfant.
- les personnes privées de liberté,
- les mineurs,
- majeurs sous tutelle
pour lesquelles il adapte les règles de consentement et de participation en permettant de requérir le consentement de la "personne de confiance", de la famille ou d'un proche.

Dans certains cas, l'avis du juge des tutelles devra être recueilli.
Le cadre proposé est donc, à cet égard, plus protecteur des "personnes hors d'état d'exprimer leur consentement".

Le protocole/Procédures administratives


Les grands axes sont les suivants :
- Remplacement d'un régime déclaratif par un régime d'autorisation.
- Adaptation des conditions des personnes vulnérables.
- Mise en place d'une base de données dont une partie sera intégrée à une base européenne...

Le dossier de demande d'AEC comprend trois parties :
- un dossier administratif
- un dossier de l'essai clinique (qui comprend le protocole de l'essai)
- un dossier technique relatif aux produits utilisés dans l'essai qui comprend le DME, le dossier des autres produits (par exemple le placebo).

L'AFSSAPS délivre une autorisation de l'essai clinique après évaluation des données disponibles sur les produits utilisés et du protocole envisagé.

Au cours de l'essai l'Agence donne également l'autorisation d'amendement et à la fin de l'essai elle reçoit les résultats.

Les Comités Consultatifs de Protection des Personnes se prêtant à des Recherches Biomédicales (CCPPRB) deviennent des Comités de Protection des Personnes (CPP).
Le Comité n'a plus un avis consultatif mais délibératif.
Il est intégré pour une durée déterminée avec une compétence territoriale.
Son avis doit être obligatoirement favorable pour qu'une recherche puisse débuter.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) joue un rôle accru pendant toute la durée de l'essai. Elle donne désormais une autorisation d'essai clinique (AEC) dans un délai maximum de 60 jours.
Directive européenne 2001/20/CE et la dernière modification de la loi Huriet-Sérusclat adoptée le 9 août 2004 basée sur l'étude du dossier du médicament expérimental (DME).

La question des délais sujette à polémique


Les promoteurs doivent non seulement obtenir l'aval du CPPRB, mais également celui de l'Afssaps qui n'exigeait jusqu'alors qu'une simple déclaration de démarrage des essais thérapeutiques.
Cette directive prévoit un délai maximal de 60 jours entre le dépôt d'une demande d'essais cliniques et la réponse des deux instances.

Le bât blesse pour l'industrie pharmaceutique française


Au Leem, on fait valoir que certains pays ont déjà fixé par voie législative ou réglementaire des délais bien plus courts.
"Dans le développement d'un nouveau médicament, en raison notamment des questions relatives à la protection des brevets, plus tôt vous mettez votre médicament sur le marché, plus longue est votre couverture de brevet l'exercice que fait toute l'industrie pharmaceutique, c'est de comprimer au maximum les délais de développement."

Des délais courts


Certains États membres s'engagent sur des délais de moins d'un mois.
Possibilité de les respecter en respectant la loi et la possibilité désormais largement ouverte d'indemniser les personnes incluses dans des protocoles comporte le risque
"d'inflation" ou de surenchère entre recherches dites sponsorisées et recherches institutionnelles ou académiques.

La transparence de la recherche


Si un essai porte sur un médicament il devra préalablement aux avis rendus par le CCP ou l'autorité compétente (AFSSAPS ou Ministre de la Santé) obtenir un numéro EUdraCT en inscrivant cet essai sur une base de données européennes dénommée EUdraCT.
Cette base sert à alimenter la base européenne pour les recherches sur les médicaments.
Elle sera théoriquement accessible au grand public et comprendra l'intégralité des avis rendus par les CCP.

Les représentants des associations de malades ou d'usagers du système de santé pourront obtenir la communication des éléments pertinents du protocole figurant sur la base de données nationale.
Cette dernière contenant les répertoires de recherches biomédicales autorisées.
Principe général : votre intérêt et votre bien-être priment toujours sur l'intérêt de la science et de la société.

L'avis n°79 du CCNE


"il faut en tous cas éviter les consentements de pure forme qui protège plus l'institution que les personnes".

La valeur de ces directives


De fait.
C'est l'utilisation de ces nouvelles dispositions et / ou la façon de les détourner qui nous permettront de juger de leur valeur.

Conclusions


À notre avis la directive n'a pas aggravé la loi Huriet. Elle semble au contraire introduire plus de transparence plus de regard de l'Etat et de ses agences sur le début, le suivi et les résultats des essais, une part plus réelle aux comités de protection dans la validation des essais, à eux de s'en emparer dans la pratique.




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