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Document Nicole Delépine - 2006
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Diagnostic, classification et traitement des tumeurs des parties molles du genou
G. Delepine,
Nicole Delepine
Diagnostic, classification et traitement des tumeurs des parties molles du genou
Sarcome des parties molles
La pathologie tumorale primitive du genou est protéiforme
A coté des tumeurs bénignes des parties molles et des dystrophies pseudotumorales il faut insister sur la prise en charge sans faute qu'imposent les sarcomes des parties molles avant de schématiser la conduite initiale rigoureuse indispensable pour faire bénéficier le malade des progrès thérapeutiques récents dans les sarcomes.
Les tumeurs des parties molles Groupe Hétérogène plus d'une cinquantaine de variétés de tumeurs primitives
Lipomes
Schwanomes
Histiocytofibromes
Fibromes
Fibromes desmoides
Hémangiomes
Leiomyomes
Arguments en faveur de la malignité d'une tumeur des parties molles :
Siège profond sous l'aponévrose.
Taille supérieure à 5 centimètres.
Sans valeur diagostique :
L'age du malade
L'ancienneté des troubles
L'existence de douleurs
L'aspect inflammatoire
Tumeurs bénignes : Fréquence relative
Les lipomes sont les plus fréquentes des tumeurs bénignes des parties molles autour du genou devant les fibromes et fibromatoses, les angiomes et les schwanomes.
Répartition de 402 Lipomes
Lipome de cuisse
Le lipome se présente comme une tuméfaction molle peu symptomatique évoluant lentement.
Le diagnostic peut le plus souvent être affirmé sur le scanner ou l'IRM avant la biopsie sur le caractère très homogène de la tumeur et sa densité lipidique (-30 à -60).
Fibromatose agressive
La fibromatose agressive est une tumeur histologiquement bénigne mais dont l'évolution, marquée par des récidives fréquentes, peut menacer la vie ou un membre.
Dans la littérature le taux de récidive observé varie entre 20 et 60 %
Casuistique
De 1981 à 1998, 50 patients souffrant de FD ont été traités et suivis par notre équipe
âge moyen : 28 ans (1-70), 30 femmes, 20 hommes.
Localisations observées
tête et cou (5)
membre supérieur (17)
tronc (9)
membre inférieur (19) dont 13 (25%) siégeaient autour du genou
Atteintes multifocales
Lors de leur prise en charge sept malades présentaient des localisations multiples:
6 atteintes simultanées de la fesse et du genou.
Une localisation de la cuisse et de l'espace sous péritonéal.
La recherche de localisation régionale est donc indispensable avant de traiter de telles tumeurs.
Atteinte bifocale hanche et genou
Jeune fille de 15 ans dont la fibromatose découverte il y a 4 ans a été traitée par chirurgie itérative et radiothérapie (45gys).
Vient lors de la 3ème rechute avec une atteinte étagée du membre inférieur pour laquelle une désarticulation de hanche a été proposée .
Un traitement conservateur par chirurgie et chimiothérapie lui a été proposée.
Après de multiples récidives et maladie est maintenant non évolutive depuis plus de 10 ans et la malade a conservé un membre fonctionnel.
But du traitement chirurgical
La chirurgie visant à réaliser une exérèse monobloc extratumorale a été pratiquée dans tous les cas lorsqu'elle ne paraissait pas exposer à des séquelles fonctionnelles.
En pratique les conditions locales n'ont permis une résection monobloc extra tumorale que dans 12 cas.
Les autres malades ont été traités par exérèse aussi complète que possible mais non mutilante
Fibromatose englobant le sciatique
Lorsque le fibrome englobait un élément noble vasculaire ou nerveux l'exérèse a été réalisée par fragmentation.
Influence des limites d'exérèse sur le contrôle local
sommation des séries de Posner, Mc Kinnon, Easter, Mirabell, Sherman, Pritchard, Kamath et Merchant.
Les exérèses contaminées n'exposent pas à davantage de récidives que les exérèses marginales.
La radiothérapie n'est guère efficace!
La moitié des malades venus nous consulter pour récidive avait été précédemment irradiés pour tenter de prévenir la reprise évolutive de la maladie.
Malade traité 3 ans auparavant par radiothérapie pour récidive "inopérable". Vient pour reprise évolutive et flessum progressivement croissant. Séquelles radiques sévères aux limites bien nettes. Genou raide en flessum.
Fibromatose : Influence de la radiothérapie sur le contrôle local
La radiothérapie ne diminue pas significativement le risque de récidive après exérèse contaminée.
sommation des séries de Posner, Mc Kinnon, Easter, Mirabell, Sherman, Pritchard, Kamath et Merchant.
Valeur de la radiothérapie sur la prévention des récidives après exérèse contaminée
La radiothérapie postopératoire ne permet pas de diminuer le risque de récidive après exérèse contaminée !
Extremity and trunk desmoid tumors. A multifactorial Analysis. Merchant. Cancer 1999;86:2045-52
Choix des thérapeutiques
Le traitement doit être adapté à chaque cas en tenant compte de :
- âge et du sexe du patient, des antécédents,
- des complications thérapeutiques possibles
- des risques possibles de l'évolution spontanée.
Fibromatose ne menaçant ni la vie ni le membre
la résection large s'impose à condition de ne pas exposer à des complications fonctionnelles.
Fibromatose menaçant le membre
Une chimiothérapie préopératoire destinée à ramollir la tumeur et à faciliter le geste chirurgical est nécessaire.
Énorme tumeur englobant nerfs et vaisseaux principaux. Une chirurgie trop ambitieuse expose le malade à de lourdes complications.
En pratique :
Dans cette maladie imprévisible, les indications doivent reposer sur l'évaluation des risques respectifs de l'évolution et des traitements.
L'essentiel est de ne pas avoir une attitude trop agressive sur des tumeurs quiescentes et en particulier éviter la radiothérapie source de la plupart des séquelles lourdes et des seules impasses thérapeutiques rencontrées.
A côté du traitement chirurgical nécessaire dans presque tous les cas mais souvent insuffisant, il faut savoir recourir de manière éclectique à la chimiothérapie, à l'Interféron et au Tamoxifène.
Arguments en faveur de la malignité d'une tumeur des parties molles :
Siège profond sous l'aponévrose.
Taille supérieure à 5 centimètres.
Sans valeur diagnostique :
L'age du malade
L'ancienneté des troubles
L'existence de douleurs
L'aspect inflammatoire
Répartition de 558 Rhabdomyosarcomes
15% des Rhabdomyosarcomes embryonnaires touchent les parties molles près du genou. Il s'agit de tumeurs de l'enfant jeune de haut degré de malignité.
Sans chimiothérapie moins de 25% des malades guérissent.
Leur traitement repose sur la chimiothérapie pré et postopératoire à base de VACA et VAIA, la chirurgie et la radiothérapie.
Répartition par sexe, topographies et age de 307 liposarcomes.
Tumeur exceptionnelle avant la puberté.
Cuisse, genou et jambe regroupent prés de deux tiers des cas.
Les sarcomes des parties molles constituent un Groupe Hétérogène de plus d'une vingtaines de tumeurs
Liposarcomes
Histiocytofibromes malins
Fibrosarcomes
Rhabdomyosarcomes
Synovialosarcomes
Angiosarcome
Hémangioendothéliome
Schwannome malin
Leiomyosarcome
Les fibrosarcomes et les MFH sont les plus fréquents des sarcomes des parties molles suivis des liposarcomes et des synovialosarcomes.
Liposarcome myxoide de cuisse
Au scanner tumeur inhomogène associant des zones de graisse (densité -70) et des zones cellulaires (d 30) et quelques calcifrications.
En IRM tumeur aux limites nettes, homogène avec en T1 une densité inférieure à celle du muscle mais supérieure à celle de la graisse.
En T2 signal plus intense que celui de la graisse.
Traitement des liposarcomes du genou
Dans la plupart des cas les liposarcomes sont de faible degré de malignité.
Leur traitement repose sur la résection extra tumorale large et la radiothérapie.
Leur évolution, menacée par les récidives loco régionales, impose une surveillance régulière par scanner ou IRM pendant au moins 10 ans.
Dans moins de 10% des cas il s'agit de liposarcomes de degré histologique élevé (3). Leur évolution est alors menacée de métastases et le traitement doit comporter de la chimiothérapie.
SYNOVIALOSARCOMES (1855 CAS) REPARTITION PAR AGE ET SEXE
SYNOVIALOSARCOMES (1855 CAS) Localisations tumorales observées
Tête et cou 9%
Tronc 8%
Fesse et hanche 9%
Cuisse et genou 29%
Jambe 8%
Épaule et bras 12%
Coude et avant bras 8%
Main 3%
Le pied et la cheville constituent le second siège, par fréquence du sarcome ténosynovial
Pied et cheville 13%
Survie après traitement chirurgical seul. 185 malades traités à la mayo clinic de 1900 à 1975.
Les synovialosarcomes se comportent comme des sarcomes de haut degré de malignité mais d'évolution lente.
Après traitement chirurgical pur les chances de guérison ne dépassent pas 15% à 20 ans.
VALEUR PRONOSTIQUE DE L'INDEX MITOTIQUE SUR LA SURVIE
L'indice mitotique élevé est un facteur de mauvais pronostic.
PROGRES THERAPEUTIQUES REALISES A LA MAYO CLINIC DE 1900 à 1975
L'amélioration du traitement local a permis de faire progresser les chances de survie en rémission à 10 ans de 5 % à 38%.
Valeur pronostique de la chimiothérapie systématique sur les chances de survie en rémission à 5 ans
Une chimiothérapie adjuvante s'impose.
Quelle chimiothérapie ?
En drogue unique l'IFOSFAMIDE Haute dose >14Gr/m²parait très efficace sur la maladie mesurable.
Chez 13 malades métastatiques Gerald Rosen a observé 4 réponses partielles et 9 réponses partielles soit au total 100% de réponses objectives.
3 de ces malades (23%) sont restés vivants en rémission.
Rosen G Synovial sarcoma. Uniform response of metastases to High Dose Ifosfamide Cancer,1994;73:2506-2511.
L'association Ifosfamide H.D. + cis platinum+ Adriamycine représente vraisemblablement la combinaison la plus prometteuse.
Carsten E.Kampe a traité par cette association 14 malades vus pour synovialosarcome localisé.
13 (93%) de ces malades sont vivants en 1ère rémission complète.
Le dernier malade a présenté une récidive locale dont il a été guéri par opération et la même chimiothérapie
Carsten E.Kampe . Synovialsarcoma.A study of Intensive Chemotherapy in 14 patients with Localized Disease. Cancer 1993;72:2161-2169
Répartition de 381 MFH
Près de 25% des MFH touchent les parties molles près du genou. Il s'agit de tumeurs de degré de malignité très variable. Le traitement des tumeurs de faible degré repose sur la chirurgie large et la radiothérapie. La chimiothérapie par HDMTX est nécessaire pour les tumeurs de haut degré de malignité.
Conduite à tenir devant une tumeur du genou.
Aspect clinique des tumeurs des parties molles
Tumeur bénigne ou maligne : habituellement masse indolore et progressivement croissante.
Tumeur des parties molles Bénigne ou maligne ?
Aucun signe clinique ne permet de différencier une tumeur bénigne d'une tumeur maligne en dehors de la taille et du siège.
En effet, si une tumeur superficielle < 5 cm de diamètre : le risque qu'elle soit maligne est faible.
Au contraire une tumeur sous-aponévrotique > 5 cm de grand axe présente un risque sur 2 d'être maligne.
Conséquences
On doit, préalablement à toute biopsie, déterminer les options thérapeutiques possibles et tout particulièrement les traitements chirurgicaux et ne concevoir que secondairement la biopsie la moins gênante pour les options thérapeutiques possibles.
Devant une tumeur des parties molles dont la malignité n'est pas exclue, le premier examen nécessaire est un examen tomodensitométrique ou une IRM.
Valeur diagnostique du scanner
Dans quelques cas exceptionnels, le scanner et l'IRM peuvent affirmer ou faire fortement soupçonner la nature précise de la tumeur.
TDM, Lipomes et liposarcomes
Le lipome se présente, en effet, comme une tumeur homogène de densité fortement négative (-70 à -30).
L'existence de certaines plages avec une densité cellulaire (30) doit faire soupçonner le liposarcome.
IRM et Synovite villonodulaire
La synovite villonodulaire hémopigmentée se trahit par la très grande richesse en fer dont le signal en IRM est assez caractéristique.
En dehors de ces cas exceptionnels
L'imagerie médicale informatisée permet de préciser l'extension locale de la tumeur
Concevoir l'exérèse monobloc extratumorale large future qui représente, en cas de sarcome, la base d'un traitement chirurgical adéquat.
Tumeur des parties molles : en pratique
Examen clinique +/- échographie
Si la tumeur est sus aponévrotique et mesure moins de 5 centimètres la biopsie exérèse peut être réalisée d'emblée.
Si la tumeur est profonde et mesure plus de cinq centimètres le risque de malignité atteint 50%.
Le scanner et/ou l'IRM sont indispensables avant tout geste chirurgical même simple biopsie.
Si l'imagerie affirme qu'il s 'agit d'un lipome ou d'une synovite villonodulaire l'exérèse complète peut être réalisée sans biopsie préalable.
mais dans tous les autres cas une biopsie réfléchie, adaptée à un abord cancérologique est nécessaire.